Histoire d'amour entre Jérôme Bosch et Harry Potter ?

En réponse à une question de Françoise D. : « Dans Harry Potter, on parle aussi de facultés magiques. Est-ce que vous voyez un rapport entre ce que nous enseigne Jérôme Bosch et l’histoire d’Harry Potter ? »

 

Premier rapport : les deux œuvres ont défrayé la chronique. Elles répondent toutes deux à quelque chose de profond dans l’inconscient des amateurs de peintures ou de romans. Du public en général, lorsqu’on pense au succès de l’œuvre de J.K. Rowling : plus de 500 millions d’exemplaires vendus dans le monde, traduits dans 80 langues, sans compter quelque 8 milliards de recettes au Box Office mondial. Une baguette magique n’aurait pas fait mieux !

Le Jardin des Délices a lui aussi toujours la cote, le nombre de livres qui lui ont été consacrés est énorme. Il attire encore les foules au musée du Prado. Alors même que 500 ans se sont écoulés et que personne n’en a compris la signification.

Cet engouement partagé ne s’explique guère par des qualités de plume ou de pinceau, ni par l’attrait d’une intrigue ou de motifs picturaux, mais beaucoup plus par le fait que le citoyen lambda « vibre » avec le message, même s’il ne le saisit pas formellement. Il le saisit peut-être mieux, en profondeur, que le critique littéraire ou l’historien de la peinture, qui s’emploient à tergiverser sur les formes, les styles, les rapports à l’histoire de l’art ou aux caprices de la littérature. D’où l’étonnement des spécialistes face à l’enthousiasme populaire. Gageons que cette résonance du grand public est un meilleur indicateur de la valeur cachée d’une production artistique que sa cotation par les spécialistes.

Y aurait-il alors un dénominateur commun entre ces deux œuvres apparemment situées aux antipodes de l’art et de la culture ? Toutes deux nous disent qu’il existe quelque chose de « magique », qui dépasse la matière. Dans Harry Potter, il s’agit de sorciers en herbe, censés apprendre dans leur école secrète l’art de la baguette et du manche à balai. Dans le Jardin des Délices, il s’agit d’une initiation aux voies d’un Éros subtil datant d’avant la chute – on parle parfois d’amour adamique – censé conduire aux facultés extrasensorielles.

La passion du public pourrait ainsi s’expliquer par un besoin universel, au moins inconscient, de développer ces « pouvoirs ». Une œuvre qui témoigne d’une telle potentialité représenterait dès lors une sorte de rédemption, un espoir d’acquérir, ou plutôt de reconquérir des capacités dont le manque est d’autant plus douloureux qu’elles font simplement partie de l’état naturel. Une compensation aux sentiments irrépressibles de frustration qu’induit leur atrophie.

Bosch nous dépeint l’innocence comme condition première à cette ascension subtile de la conscience. Tous ses personnages, bien qu’arborant une nudité intégrale, émanent une candeur sans tache. Leurs regards et leurs gestuelles nous éveillent au message que délivre chaque motif, sans une once de gêne ni de fausse pudeur malgré des contenus ostensiblement érotiques.

Dans Harry Potter, ce sont également les élèves les plus innocents, la classe des Gryffondor, au contraire de la classe des Serpentard, qui progressent au mieux sur la voie du magique. L’opposition constamment soulignée entre l’harnieuse arrogance de Malfoy et l’apparente fragilité de Harry ne laisse aucun doute sur l’importance de cet état de transparence.

Voilà qui correspond à ce que montre l’expérience : c’est dans une attitude d’innocence intérieure, d’ouverture, d’interrogation, tout à l’opposé de ce que l’on appelle l’Ego, que peuvent émerger ces facultés transcendantales. La brutalité, la volonté de puissance, l’orgueil en signent aussitôt l’évanouissement. Ce ne sont pas des choses que l’on peut posséder, contrôler, exploiter, mais plutôt une contrepartie du don de soi, de la disponibilité, de l’honnêteté profonde.

Les deux œuvres se rejoignent sur un autre point essentiel : Bosch place l’Éros au centre de l’accession à l’extrasensoriel, en tant que source d’une énergie représentée par les innombrables fruits et sphérules rouges ou bleus qui ponctuent le panneau central. Dans Harry Potter, la notion d’énergie est aussi présente : elle est symbolisée par le Vif d’Or, que les concurrents doivent attraper lors de tournois mémorables, petite boule ailée qui ne se laisse capturer que par les plus doués. L’énergie métapsychique est effectivement insaisissable, elle n’obéit pas à la volonté, apparaît ou disparaît sans prévenir, prend des formes que l’on n’attend pas.

A contrario, on ne trouve dans le roman de J.K Rowling aucune allusion à la vie proprement sexuelle des protagonistes, alors que les motifs du Jardin des Délices mettent en scène des pratiques indubitablement érotiques.

Le moyen-âge était de loin moins pudibond que notre époque marquée par le puritanisme. Exportée d’Angleterre, la morale puritaine inspira jusqu’à la psychiatrie : le fameux De psychopathia sexualis, paru au milieu du XIXe sous la signature du tristement célèbre Krafft-Ebbing, a laissé des traces profondes dans le monde occidental. C’est sans doute pour cette raison que l’inspiration de l’auteur n’a rien laissé passer de proprement sexuel dans l’ensemble des sept volumes.

Et pourtant... On ne voit jamais la poutre qu’on a dans l’œil ! Ici, en fait de poutre, il s’agit plutôt d’un manche à balai. C’est en chevauchant à des vitesse folles des balais de différentes qualités que les concurrents poursuivent le Vif d’Or. Que peut bien représenter un manche à balai que l’on tient entre les jambes ? Manifestement le sexe en érection – un avatar du « phallus sacré », qui était justement un objet de culte pour les Anciens. Donc en rapport avec le divin, auquel le magique est censé donner accès.

À cela, on peut opposer que l’on voit plutôt les sorcières que les sorciers s’envoler sur des manches à balai. Cette allégorie date du XVe siècle et pourrait bien évoquer le mauvais usage que l’on peut faire du coït (la brosse représentant le sexe féminin pénétré par le manche). La source d’énergie pourrait être détournée dans le sens d’une recherche de pouvoirs malfaisants.

Une telle dérive s’explique par la perte progressive de la fonction métapsychique de l’amour. Ceux qui n’y ont plus accès projettent sur elle la dichotomie entre le bien et le mal propre à l’approche intellectuelle : les sorcières seraient – inconsciemment – les méchantes femmes qui abusent de l’énergie sexuelle pour alimenter une magie noire.

On a toujours tendance à diaboliser ce qui nous échappe. L’expérience de l’extrasensoriel me donne plutôt à penser que la magie ne peut être que blanche, que les facultés extrasensorielles ne peuvent qu’œuvrer pour le bien de tous même lorsqu’il y a des conflits. Ce qui expliquerait que les Américains et les Russes aient fini par abandonner les recherches entreprises pour les utiliser en tant qu’armes de guerre.

Un philosophe, un seul, nous parle en termes clairs d’une telle fonction de l’Éros : Platon. Il met dans la bouche de Socrate, son maître et père de la philosophie, un discours que bien des exégètes semblent encore ne pas avoir assimilé. Le texte grec dit pourtant clairement que le Dieu Éros préside à une forme d’amour physique dont la fonction, tout à l’opposé de la sexualité ordinaire, consiste à faire pousser les ailes de l’âme ; celle-ci peut alors prendre son envol vers les Essences, nourriture des Dieux, situées au-dessus de la voûte du ciel.

La traduction est instantanée. Les ailes de l’âme sont les facultés extrasensorielles, qui lui permettent d’accéder à une dimension supérieure. Les Essences, tout comme les Archétypes de Jung, sont les valeurs éternelles dont se nourrit la vie spirituelle. Platon a certainement hérité ces notions des philosophes présocratiques. Un rapport entre sexualité, extrasensoriel et spirituel est donc présent aux origines de notre civilisation.

On peut s’étonner qu’il en reste si peu de traces dans notre culture moderne. Peut-être ne savons plus en déchiffrer les vestiges. L’œuvre de Bosch en est l’exemple le plus criant. Depuis cinq siècles, elle nous met sous les yeux, à peine cryptée, la fonction de l’amour physique dans l’accès à une dimension transcendante de la réalité. Et pourtant les exégètes reconnaissent unanimement devoir donner leur langue au chat. Une obscurcissement des esprits sous l’influence des Lumières ?

Le roman est moins explicite, mais on y trouve tout de même quelques indices. Harry est amoureux de Ginny, la sœur de Ron, et Ron supporte mal leur attraction. Il y a aussi dans le 6e épisode, l’extase romantique de Ron, ridiculement épris d’une camarade, Lavande Brown, après avoir ingurgité par accident une élixir d’amour qu’Harry avait préparé pour sa propre dulcinée. Plus les années passent, plus se dessinent les traits de virilité et de féminité caractéristiques des amours adultes. On voit dans le 7e épisode l’esquisse d’une relation transcendante entre Harry, Ron et Hermione, en contraste avec les relations que mènent leurs camarades.

Faute d’en avoir les clés, ces éléments passent inaperçus, comme de simples références à la vie quotidienne des jeunes. Derrière cette apparente banalité, on peut pourtant déchiffrer les critères qui différencient l’Éros platonicien ou boschien de la sexualité courante.

La première leçon du Jardin des Délices nous est donnée par un étrange duo, que certains exégètes interprètent comme un exemple d’amour « transfiguratif ». La maladresse ostentatoire des personnages nous met pourtant sur la piste d’une tout autre leçon: la femme se raidit comme pour échapper à l’emprise d’un agresseur. Son profil témoigne d’un malaise évident. Sa main gauche évoque plus une gifle magistrale qu’une caresse amoureuse. Elle renvoie aux deux mains éplorées d’un troisième personnage, qui semble faire naufrage dans un fût à la dérive.

Le personnage principal du groupe nous fixe du regard, comme pour attirer notre attention. Sa main gauche exprime une volonté de posséder la femme, pendant qu’il retient la gifle de la main droite. En accord avec les autres motifs de ce panneau central, on déchiffre dans ce trio une règle maintes fois répétée : l’Éros dont il va être question exclut la possessivité.

Tous les motifs font en effet intervenir plus de deux partenaires. Le nombre 3 est crûment souligné par le rouge inattendu d’un tronc d’arbre anormalement triangulaire, où se cachent trois personnages. Trois personnages aussi dans le chardon, et trois dans la pêche flottante si l’on en croit la jambe qui dépasse.

Il est clair que la jalousie est le poison par excellence de l’amour. Elle enferme le couple dans la binarité et induit des forces de reproche qui détruisent l’amour. Elle alimente l’Ego, qui justement doit être dépassé. Elle signe la mort de l’Éros transcendantal que Bosch nous dépeint en tant que mystère de l’accomplissement spirituel. C’est d’ailleurs dans une relation triangulaire que les parents d’Harry ont été tués par Voldemort. Ces forces destructrices sont ainsi clairement mises en relation avec la destruction de l’amour par la jalousie.

Dès lors faut-il voir derrière les intriguettes amoureuses du roman plus que de simples frasques adolescentes. Le 7e épisode est particulièrement explicite sur ce point ; Ron se voit rongé par une jalousie vide de sens, alimentée par les seuls fantasmes qu’il projette sur Harry et Hermione, et les Mangemort apparaissent dans le ciel. C’est en effet dans ces premières expériences amoureuses que se noue l’imbroglio psychologique où s’empêtreront les amours futures, condamnant l’Éros subtil à l’échec et avec lui le destin spirituel de l’individu.

L’adolescence est la période sensible qui voit émerger les pulsions sexuelles liées à la reproduction. Cette part de la sexualité humaine, directe héritière des mécanismes reproductifs propres aux animaux supérieurs, est aux antipodes de l’Éros à but métapsychique. L’apparente proximité des deux fonctions fait que l’on a constamment tendance à confondre les espèces. Des comportements sexuels semblables dans la forme peuvent recouvrir des processus psychiques différents, même totalement opposés quant à leurs contenus et leurs aboutissants.

La Chute, telle que la décrit la Genèse, met en scène cette confusion millénaire et ses conséquences dramatiques. « Tu n’es que poussière et retourneras à la poussière » : celui qui a perdu l’accès à la fonction supérieure de l’amour sera chassé du Paradis, sa vie restera confinée au monde de la matière. Le serpent représente l’intellect, le désir calculé, en un mot l’Ego, qu’il suffit d’écouter pour garantir l’échec de l’Éros.

Bosch nous en brosse crûment le contraste : entre l’aboutissement céleste des dévotions amoureuses du panneau central, et les géhennes ténébreuses d’un Enfer centré sur l’obsession du coït, sous le signe d’une paire d’oreilles, le clair-obscur est sans appel.

Un même contraste catégorique dessine la trame du roman : quête de la magie par l'enfant d’une part, forces destructrices de Voldemort d’autre part. Harry lui-même en porte la marque dès la naissance. La mort de ses parents n’est pas sans signification : ses parents n’ont pas été pour lui ce qu’ils auraient dû être. Leur disparition signe manifestement le traumatisme œdipien, équivalent au refoulement des pulsions propres à l’Éros. Et c’est cette perte irréversible qui nécessite tout un réapprentissage de la magie, dont les arcanes auraient sinon pu être transmis directement de génération en génération. Seuls de rares élus, comme Harry, parviennent à conserver des dispositions favorables.

Les pulsions de l’enfant, dirigées d’abord vers ses parents, n’appartiennent de toute évidence pas à la fonction procréative de l’amour. Elles sont au contraire et en toute logique les premières émergences de sa fonction transcendante. Faute d’avoir pu les vivre, l’individu arrive à la puberté sans le bagage d’expérience et d’apprentissage qui lui aurait permis de structurer la fonction métapsychique de l’Éros et de bien la différencier des pulsions de la maturité.

Sa libido s’engouffre alors dans un surinvestissement des contingences procréatives : il attend du sexe opposé, du couple, du coït, de l’enfantement, de la vie de famille, les félicités que seul l’Éros sacré saurait lui donner. Il s’ensuit une confusion pulsionnelle qui marquera tous les élans affectifs de l’adulte futur, avec pour conséquences de constantes déconvenues, séparations, et souffrances amoureuses.

Les tribulations d’Harry et de ses camarades dénoncent cette importance démesurée placée dans la séduction, l’amour romantique, la drague, la danse, qui sont autant de chemins de traverse aptes à égarer les magiciens en devenir. L’auteur a très bien mis en scène ces composantes faussement viriles ou féminines que les jeunes des deux sexes se sentent obligés d’imiter du monde adulte. Elles proviennent en réalité de la confusion qui se produit, aux tréfonds des affects, entre les deux formes d’amour et cristallise les psychismes sur un modèle de fonctionnement démuni de toute dimension magique

Ainsi se profile une signification plus précise de l’école de Poudlard et de ses aléas. Plus que comme une authentique école de magie, elle apparaît comme métaphore des expédients qui restent aux jeunes pour développer leurs facultés métapsychiques. Bien que dirigée par un sage authentique, Dumbledore, elle est hantée par toutes sortes de monstres et d’angoisses, par des professeurs eux-mêmes atteints de défauts de personnalité incompatibles avec l’objet de leur enseignement, victimes de leur Ego ou émissaires secrets de Voldemort, sans compter les intrusions du ministère de la magie. Jolie caricature de ce que le système éducatif offre aux jeunes pour développer leurs facultés transcendantes.

Un autre parallèle entre Bosch et Potter : la dénonciation de la famille en tant que tombeau de toute efflorescence magique. Harry est recueilli par son oncle, mais logé sous un escalier poussiéreux, réduit à un état d’esclavage, victime des harcèlements de son cousin, caricature de l’enfant gâté dans un monde où ne compte que la matière. Ce n’est qu’en fuyant cet enfermement miteux qu’Harry peut rejoindre l’école de Poudlard. Mais là encore, la nostalgie qu’il conserve de ses parents lui est interdite au risque de voir échouer son avenir de magicien.

Bosch nous livre un tableau tout aussi peu réjouissant de la vie familiale dans son célèbre « Char de Foin ». Sur le char trône une famille qui paraît à première vue parfaitement harmonieuse. Puis en l’examinant de plus près, on constate que les parents et l’enfant s’évertuent péniblement à déchiffrer une même partition musicale (difficulté à jouer le jeu de la famille parfaite), accompagnés par un démon (les forces destructrices qui émanent du couple), les branches sur lesquelles ils sont assis sont desséchées (disparition de l’énergie métapsychique), un ange qui paraît prier le Christ voit son regard oblitéré par une cruche enfilée sur un bâton (obsession de la pénétration), dans le buisson situé derrière le trio, un mari fait des propositions à sa femme répugnée (le devoir conjugal), à droite, une chouette évanescente est perchée sur une branche sèche (perte des fonctions extrasensorielles), et le Christ fait du haut de son nuage un signe d’impuissance.

Le char est accompagné par une importante procession, qui commence avec de hauts dignitaires du pouvoir et de la religion, pour se transformer peu à peu en disputes jusqu’au meurtre et, tout à droite, en démons incarnant l’obsession sexuelle, aboutissant dans un enfer où s’élève une tour creuse hantée par des yeux de lougarou. Le panneau de gauche raconte sous forme de bande dessinée l’histoire de la Création, de la Chute, et de l’expulsion du Paradis, qui préside selon Bosch au rituel du mariage. La gestuelle des personnages dénonce l’artifice de cette histoire du monde. Difficile de trouver une critique plus dure de la bonne morale chrétienne.

Nous vivons dans un monde où se côtoient dans un conflit permanent, plus ou moins ouvert suivant les temps de l’histoire, d’une part les religions, et d’autre part le matérialisme, qui se veut non religieux mais est en fait devenu le nouveau credo : les scientifiques et tous les rationalistes à leur suite ont foi dans les lois de la matière. Et pas seulement dans le sens qu’on puisse en attendre une fiabilité dûment vérifiable, mais dans celui qu’on en espère inconsciemment une sorte d’accomplissement – ce que les religions appellent le Salut.

Ce dispositif laisse pourtant ses sectateurs sur leur faim : chacun pressent qu’il devrait y avoir autre chose que cette alternative entre la foi en un Dieu qui honore plus que rarement ses rendez-vous, et une Science qui mène l’humanité à une catastrophe écologique, à un Enfer sur terre plutôt qu’à un Paradis terrestre. Un manque lancinant traverse les cœurs, et même si l’on est incapable de le cerner par des mots ou des afffects précis, un sentiment de frustration mine nos inconscients.

C’est à ce sentiment de frustration, d’une puissance égale à son enjeu existentiel, que des œuvres « rédemptrices » comme le sont les triptyques impressionnants de Jérôme Bosch et les gros volumes de Mme Rowling doivent leur pérennité et leur succès. L’espoir d’une redécouverte des valeurs perdues fait bouger les foules, sans forcément qu’on n’en comprenne la raison.

Le genèse d’œuvres de ce type, révélant au monde des secrets essentiels restés hermétiques depuis des millénaires, s’explique par la même résonance chez leurs auteurs. L’artiste, au moment où il crée un tableau ou une histoire, voit s’ouvrir à chaque instant plusieurs voies possibles. Il a le choix entre tel motif pictural, ou tel virage de l’intrigue. Certains de ces aiguillages, issus de l’imagination ordinaire, ne correspondent à rien de profond. D’autres, provenant d’une inspiration plus authentique, résonnent avec les aspirations inconscientes. Et celles-ci vont bien souvent dans le sens de la réhabilitation de l’Éros originel et de ses enjeux transcendants. Le créateur choisit alors automatiquement la voie qui correspond à ses aspirations inconscientes, même s’il est incapable de les formuler avec des mots.

C’est ainsi que se définit la « mythogenèse ». Les mythes, les œuvres d’art, peintures, romans, films se créent en permanence à partir de ces mécanismes inconscients, en tant que tentatives de réhabilitation de la fonction sacrée de l’Amour, y compris de l’amour physique. Ils nous rappellent d’une part la perte essentielle qui caractérise notre culture judéo-chrétienne et que la Genèse nous désigne en tant que péché originel, et d’autre part nous promettent une rédemption, visant à rétablir les fonctions spirituelles naturelles que ni la Religion, ni la Science ne sont parvenues à nous restituer.


 

N.B.: Pour ceux qui s'intéressent soit à Harry Potter soit à la mythogenèse, soit encore à la fonction transcendante de l’amour, une version expliquant point par point la symbolique du roman en termes de métapsychanalyse se retrouve sous forme d'ebook ici : http://bit.ly/2XUTDl1.

Les livres déjà édités « Essai sur la théorie de la métasexualité » et « Jardin des Délices, le mystère Jérôme Bosch résolu ? » apportent les principales clés de déchiffrage : https://www.culture-nature.eu/titres/